Portrait


Grâce à l’impulsion de son fondateur, voilà plus de trente ans qu’Orfite ne transige pas avec sa mission de transmission. Des codes-barres à la construction modulaire, des films rétro-réfléchissants aux écrous à sertir en passant par les pièces en céramique, les parfums et fragrances, Daniel Janin a accompagné des visions d’entrepreneurs dans une large variété de secteurs. Mais avant cela, esquivant les classes préparatoires qui lui étaient destinées, le Grenoblois fréquente les bancs de Sciences Po Paris et met le pied à l’étrier au sein de l’INSEAD Fontainebleau. Comme beaucoup de talents qui rejoindront par la suite l’orbite tracée par Orfite, le jeune diplômé participe à la grande époque de la banque d’investissement Indosuez, où la rigueur se faisait déjà l’alliée de l’imagination. C’est là qu’il se forme à l’entrepreneuriat, qu’il commence à partager les rêves des dirigeants et à dissiper leurs doutes. Désireux d’aller plus loin et de voir ce qui se trouve réellement derrière les bilans, Daniel démontre rapidement qu’il a toute sa place dans le monde de l’investissement. Plusieurs transactions réussies dessinent cette nécessité d’organiser les transmissions ; une étape obligée et si souvent négligée.

Il s’en fallut d’un beau matin pour qu’au tournant des années quatre-vingt-dix, Daniel se lance définitivement dans l’aventure Orfite. Il se rend boulevard Montparnasse afin de rencontrer chez lui « un certain Monsieur Martin » ; l’expert des compresseurs et amateur de vins bouillonnait d’idées pour développer son activité de cave au-delà des bouteilles.

Sans se douter qu’il commençait à forger le modèle – « mais l’esprit était déjà là ! » – Daniel s’investit dans Eurocave. Trente ans plus tard, certains pionniers qu’il a rassemblés sont toujours au capital de cette Entreprise du Patrimoine Vivant. L’histoire s’écrira également aux côtés de Pascal Sochet, un autre « caractère travailleur » qui rejoignit Orfite dès l’époque où la petite officine villeurbannaise ne comptait que deux tables et deux chaises : « J’ai fait sa connaissance alors qu’il conseillait un patron avec lequel j’étais en négociations auparavant ; son exigence m’a tout de suite plu. Il a eu vent d’Orfite lors d’un voyage en train, tout comme Laurent Talbot, à présent directeur des participations, qui faisait alors la queue dans un wagon bar. Preuve qu’il faut se méfier du TGV ! »

Si cette réussite tient bien sûr à ces fameux vingt-sept critères que Daniel a modélisés, eux-mêmes gradués de un à cinq, le méthodique aura toutefois prouvé que les exercices qui comptent se passent parfois d’exercices comptables. Aucune échéance sur les participations, aucune enchère et aucune affaire conclue par médiation, le fondateur pose les fondamentaux d’emblée. Ceux d’une structure qui revendique son originalité et se régit par ses propres règles : servir l’intérêt industriel et entrepreneurial, faire de la souveraineté du dirigeant un enjeu central. Daniel préfère les face-à-face aux data rooms, grave dans la roche ce principe du gré à gré, et bien loin de la figure de « l’homme à la mallette », tient à ce que son équipe s’associe personnellement sur chaque projet. Trois décennies à les sélectionner un à un sans jamais s’abandonner à la loi des grands nombres ; de solutions créatives, déployées face à des situations précises et sur mesure. Trois décennies de récits de fidélité marquants, dont certains durent depuis plus de vingt-cinq ans, partagés par des talents à la même envie : que chacune de ces entreprises continue de vivre – « la question de la transmission est bien sûr celle de la pérennité. »

Les collaborateurs Orfite ont tous été formés par des visites en binôme qu’Orfite a désormais inscrites dans son génome, un moyen des plus sûrs de « développer le flair ». Ce même flair qui fait fleurir des entreprises dans le bassin rhônalpin, en région parisienne, à Nantes, mais aussi jusqu’à Grasse. Où qu’ils soient, les dirigeants sont nombreux à se retrouver au sein de la communauté d’entrepreneurs Orfite, de l’autre côté des opérations, afin de les financer. Avec tant de services accomplis, d’autres poursuivent la route alors que le processus est arrivé à son terme, témoignant des vertus d’un tel accompagnement. Conscient de la valeur d’une « équipe magnifique qui doit perdurer dans ce qu’elle est », Daniel a tenu à appliquer tout ce qu’Orfite s’est attelé à proposer : c’est à ses collaborateurs qu’il remet progressivement les rênes à partir de 2010. Une période à présider le comité de surveillance sur des points factuels préfigure l’autonomie du Directoire actuel. Toujours actionnaire, Daniel répond avec plaisir aux sollicitations, et reste présent aux consultations. Entre les tableaux de bord, les rapports, les performances des produits, les calculs et scénarios simulés auront toujours de quoi le stimuler.

Heureux d’avoir humblement participé à faire grandir des pépites de l’industrie française, il l’est aussi d’avoir honoré la confiance de tous ceux qui ont accordé du crédit à ses intuitions : « Au trentième anniversaire d’Orfite, quand j’ai vu arriver les enfants de mes investisseurs, c’était très émouvant. » Aujourd’hui encore, lorsqu’il sonde les mystères impénétrables de Pétra, ou arpente les forêts tropicales du Guatemala, Daniel ne manque jamais de contempler la trace laissée par les générations qui ont précédé.