La situation initiale


À l’époque où les écoles spécialisées n’étaient pas encore nées, un parfumeur natif de Grasse saisit toute l’essence de la magie olfactive. Les années soixante-dix, de jolies notes sur vingt ; un diplôme de chimie en poche, et le jeune Jacques se fait recruter par une entreprise de parfum. Il se forme au contact des anciens, maîtrise le tour de main et confirme assez tôt qu’une belle fragrance n’est pas seulement affaire de flair. Il y a aussi l’art et la manière. Le distiloire se fait témoin discret d’un apprenti peu économe en heures, et décidé à faire bien plus. Les clients qui souhaitaient échanger avec un fin technicien ont sans doute pu, en note de fond, déceler sa fougue entrepreneuriale.

L’élément perturbateur


Encore loin du prestige des Cologne et du marbre, Expressions Parfumées a littéralement démarré sans charpente. Dans la cave de sa petite maison, Jacques installe un laboratoire, sachant bien qu’il ne pourrait pousser les murs davantage – il s’engage plutôt à un service sur mesure. Et déjà les premiers clients lui tirent leur chapeau pour cette excellence, déjà les premiers fournisseurs jouent-ils le jeu en faisant preuve de patience. À Grasse, ils sont fort peu à n’avoir pas entendu parler de Jacques Lions. L’on en parle jusqu’en Allemagne, au Tchad, au Niger, au Zaïre, et même au Japon. Les décennies avancent et les chiffres prospèrent, Franck, le fils de Jacques, rejoint l’équipée. S’il n’aura jamais été sujet de problèmes financiers, la question se pose de savoir comment estimer la valorisation de ce travail de construction, les nuits sans nombre, la sueur du front ?

Les péripéties


Le dirigeant consent à envisager une opération encore avant-gardiste, un LBO : ce ballet de plusieurs mois l’emmène de bureaux en bureaux. Des messieurs en costumes- cravates noirs aux messieurs en costumes-cravates gris, tous avancent leurs chiffres et tous sourient. Des promesses faramineuses et des projets que le fondateur accueille, sans que jamais ne s’allume son œil. Méfiant et saisi par le doute de commettre une erreur, Jacques rebrousse immédiatement chemin. Parce que les acrobaties économiques ne l’amusent guère et qu’il chérit son souhait de développer une entreprise saine, le parfumeur met fin à tout ce manège.

Le dénouement


« Jacques, une dernière tentative, ceux-là ne sont pas pareil ! », lui souffle-t-on à l’oreille. Bon sens, dialogue, aisance – la réticence se transforme en évidence. Orfite remet l’expertise à sa place : elle n’est pas entre les mains des investisseurs, mais bien entre les mains de ceux qui œuvrent à Grasse. Durant les années qui suivirent la signature en 2006, Expressions Parfumées n’a pas dévié d’un gramme de son âme artisanale. Les orgues ont continué de renouveler leurs mélodies pour chaque demande, chaque pays, sans que les formulations ne soient jamais contraintes par des plans de standardisation. Parce qu’il respecte les conditions qui vont de pair avec sa nouvelle situation, Jacques peut rester fidèle à cette philosophie de la poignée de mains, à cette confiance dans les deals qui se débloquent en un coup de fil. Avec ses nouveaux associés, de qui il obtient plusieurs conseils, il apprécie qu’il n’y ait ni process asphyxiants, ni strates hiérarchiques à remonter. Tout est régi par une gestion des chiffres prudente, de la recherche d’opportunités aux recettes, en passant par l’échelonnage de la dette. Les investissements machines se succèdent, les filiales se déploient même en Italie, une période faste durant laquelle Jacques se sent soutenu, et surtout compris. Pour cet allergique aux réunions, l’aéroport de Nice héberge son lot de points qu’on aborde comme on reverrait un cousin, de passage dans le coin. Lorsqu’il retrouve ses complices, que les trajectoires sont minutieusement cadencées, les plans vérifiés et les axes opérationnels posés, les tableaux de bord entrepreneuriaux s’éclipsent devant ceux des automobiles que Jacques conduit en rallye. Un résultat appréciable bien au-delà des bilans comptables, puisque année après année, les retrouvailles se font autour d’un bouchon à Lyon ou d’une virée dans le Luberon. Comme il a pu constater tous les bienfaits de cet accompagnement, Jacques a rejoint la communauté des entrepreneurs Orfite, investissant à son tour pour que les projets de nos régions puissent éclore.

La situation finale


Le fils de Jacques préférant voguer vers d’autres perspectives, Expressions Parfumées céda finalement la part des Lions. L’entrepreneur ayant toujours été du genre « on prend les mêmes et on recommence », c’est une arrivée inattendue qui bouscule le plan initial d’un troisième LBO pour soutenir cette croissance. Un vendredi après-midi que rien ne distinguait des autres, il fit la connaissance d’un amateur de belles carrosseries. Tout naturellement, l’entrepreneur engage la conversation ; une belle mise au parfum puisque notre amateur n’était autre que le directeur international du numéro un mondial !

D’une modeste SARL montée avec vingt-mille francs de finances effectives, Expressions Parfumées figure désormais au premier rang des références olfactives.

– Une histoire rendue possible par Orfite.